dimanche 8 mars 2009

Billie Holiday alias Lady Day


Discrimination des femmes noires aux Etats Unis, violence, drogue, viol: tant de vices et d'injustices qui n'épargnent pas Billlie Holiday et les autres femmes en ce début de vingtième siècle.
Seul échappatoire possible pour la future Lady Day: la musique. La musique qui va faire d'elle une femme reconnue, une femme admirée, une femme respectée.



  • "Même si vous êtes une traînée, vous ne voulez pas qu'on vous viole. Même une pute qui ferait vingt-cinq mille passes par jour ne voudrait pas se laisser violer. C'est la pire des choses qui puisse arriver à une femme et ça m'est arrivé quand j'avais dix ans."Billie Holiday dans son autobiographie "Lady sings the blues".
La petite Eleanora Fagan voit le jour à Baltimore en 1915. Fille d'un père musicien sans cesse sur les routes et d'une mère qui la laisse aux soins de sa soeur, Eleanora subit très tôt les violences de cette dernière. Quelques années ont passé. Sa mère la reprend avec elle mais lorsqu'elle part travailler, Eleanora se retrouve seule chez elle et finit par se faire violer par son voisin... La fillette est ensuite envoyée dans un couvent. Loin d'être revigorant, son séjour est synonyme de maltraitances et d'humiliations. En 1928, sa mère l'emmène vivre avec elle sur son lieu de travail: un bordel. La vie s'acharne contre la future "diva du jazz" car elle passe même quelques jours en prison alors qu'elle est encore très jeune avant de découvrir les clubs de jazz...


  • Un talent unique.

Singulier. Voilà comment la plupart des gens qualifient l'art de Billie Holiday. Son timbre de voix fragile et lancinant lui permet d'évoquer une grande sensibilité ce qui lui vaut d'être citée comme la voix la plus émouvante de l'histoire du jazz. Sa voix pourtant très limitée(cinq notes environ)lui permet de créer un son extraordinaire, chose nouvelle à l'époque. Son style intimiste l'oblige à se produire dans des petits salles. Elle se contente d'abord de pourboires, puis, est remarquée par un producteur de Columbia qui lui propose 35 dollars pour une session. C'est le début de sa carrière. Victime du racisme dans les états du Sud qui refusent de l'écouter (ni même de lui louer une chambre!), elle accompagne quand même le grand orchestre de Count Basie puis celui d'Artie Shaw(seule femme noire parmi des musiciens blancs). Lady Day, comme l'a rebaptisée Lester Young, est également la première artiste noire à chanter au Met(grande salle d'opéra de New York). Elle signe par la suite un contrat en or avec Decca mais la diva du jazz est alors accro à l'héroine et tout son salaire y passe. C'est le début de la fin. La chanteuse entame une grande tournée en 1945 mais sa mère décède peu de temps après. Billie Holiday entre en dépression et abuse de drogues en tous genres(alcool, héroine...) qui détruisent peu à peu sa carrière. Trous de mémoires, prestations difficiles: la chanteuse déçoit. Elle enchaine les relations chaotiques avec les hommes, fait de la prison, est "descendue" par la presse et perd son contrat avec Decca en 1950.

Celle qui incarnait l'élégance, l'humour mais aussi la colère et le désespoir de la réalité noire américaine meurt en 1959. La fin d'une époque.



Ecrit par un enseignant d'origine juive connu sous le pseudonyme Lewis Allan, le poème "Strange fruit" est rendu populaire par Billie Holiday en 1939. La chanteuse devient alors la première femme à dénoncer les crimes perpétrés par le Ku Klux Klan. Son interprétation, décrite comme directe et incisive, a la particularité de transporter le spectateur devant la scène évoquée. Lady Day donne un souffle nouveau au texte. Lors de la première représentation, le public hésite, bouche bée, quelques applaudissements se font entendre, puis, la foule conquise clame son enthousiasme. "Strange fruit" marque les esprits et le Café Society de New York. La chanson parle des cadavres de noirs pendus aux arbres dans les champs de cotton des états du Sud...

Les arbres du Sud portent un fruit étrange.

Du sang sur les feuilles, du sang sur les racines,

Un corps noir se balançant dans la brise du Sud.

Etrange fruit pendant aux peupliers.

Scène pastoral du vaillant Sud.

Les yeux exorbités et la bouche tordue,

Parfum de magnolias, doux et frais.

Puis une odeur soudaine de chair brulée.

Voici un fruit à picorer pour les corbeaux

Que la pluie fait pousser, que le vent assèche.

Pourri par le soleil, il tombera de l'arbre.

Voilà une étrange et amère récolte!


Eleanora Fagan, Billie Holiday, LadyDay. Son courage, son talent et sa détermination lui permettent de s'illustrer dans bien des domaines. Repousser la misère. Combattre la discrimination réservée aux noirs américains de l'époque. Devenir la plus grande diva du jazz. Des victoires qui font d'elle une de ces femmes qui marquent des génerations entières et que l'on oubliera surement jamais.



  • Sources:
Sites internet:
Extrait du livre "Le livre noir de la condition des femmes"
Image de Billie Holiday
Recherche Wikipédia
Recherche sur Billie Holiday
Strange Fruit sur Wikipédia
Analyse de la chanson "Strange Fruit"

Revues, livres:
- Philosophie magazine n°27 de mars 2009-p90-article"Le jazz, expression de l'impensable?"
-"Lady sings the blues" de William Dufty- édité aux Etats Unis en 1956- 199 pages

Camille Moreau.


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